La News du VÉGÉTAL#21
Pré-bilan moisson
Moisson 2023 : Tout qui commence bien qui finit mal !
La moisson 2023 a comme un goût d’amertume tant on l’attendait exceptionnelle au printemps, mais qu’elle déçoit finalement avec des rendements et des qualités loin des potentiels attendus. L’adage « Les campagnes se suivent, mais ne ressemblent pas » se vérifie donc une nouvelle fois cette année. En effet, la moisson 2022 s’était déroulée en un temps record avec des qualités excellentes tandis que la moisson 2023 s’est éternisée, car fortement perturbée par la météo qui est venue dégrader les rendements et les qualités.
Tout avait pourtant si bien commencé avec des bonnes conditions d’implantation voire très bonnes pour ce qui est du colza ou des céréales à paille. La météo a été favorable jusqu’à la fin mai sans épisodes météorologiques violents. En revanche, le mois de juin a été très chaud accompagné d’un vent séchant venant accentuer le déficit hydrique. Ainsi, comme l’an dernier, les conditions météorologiques ont fait que la moisson a été lancée précocement en Bretagne.
Après ce point climatique, il est difficile de dresser le bilan des différentes cultures tant il est hétérogène d’un secteur à un autre, d’une variété à une autre, d’une date de récolte à une autre… Bref vous l’aurez compris, le maître-mot de la moisson 2023 est HÉTÉROGÉNEITÉ. De manière générale, la récolte d’orge fut bonne avec des rendements moyens de 70-75 q/ha, des PS corrects à 64,5 et des humidités inférieures aux normes. Alors que la récolte de colza fût excellente l’an dernier, c’est la douche froide cette année avec un rendement moyen de 30 q/ha. En ce qui concerne le blé tendre, l’Ille-et-Vilaine tire son épingle du jeu avec des rendements moyens autour de 82 q/ha alors qu’ils sont quasiment inférieurs de 10 q/ha sur les Côtes-d’Armor ou le Morbihan. Même constat sur la protéine avec un écart d’un point entre ces deux régions (11,1% vs 10,1%) ou encore sur les PS (75 vs 71). En effet, la pluie a stoppé les battages et la moisson en blé n’était avancée qu’à hauteur de 50% fin juillet quand elle était finie l’an dernier. Enfin, la culture de la féverole mise sur orbite par la nouvelle PAC 2023 s’en sort plutôt bien avec des rendements moyens autour de 40-45 q/ha.
Fort de ce constat, la coopérative Le Gouessant a décidé de changer ses barèmes PS sur toutes les céréales à paille pour aider et soutenir financièrement nos adhérents dans cette année atypique. Un geste fort de 3 à 6 €/T de moyenne en fonction de la tranche de PS.
Avec le contexte géopolitique actuel qui fait fluctuer les marchés, il est important de segmenter sa commercialisation de ses cultures dans le temps et sur différentes offres commerciales pour limiter le risque de prix.
Maïs fourrage : estimation des dates de récolte
Avec en moyenne 2°C à 3°C de plus par rapport à la moyenne de référence 1991-2020, le mois de juin est le deuxième le plus chaud depuis 1945 et juste derrière 1976. Les valeurs de juillet sont quant à elles plus proches des normales saisonnières même légèrement inférieures avec un net manque d’ensoleillement et une pluviométrie élevée. En lien avec ces données, Arvalis présente ci-dessous la carte réalisée le 08/08/23 des dates prévisionnelles de récolte fourrage.
OAD SENCROP : des données au plus près de vos parcelles.
En complément de ces informations, notre réseau de stations météo Sencrop nous permet de réaliser une approche plus précise géographiquement. Les relevés Sencrop issus des stations connectées nous permettent d’évaluer la maturité du maïs et nous aident à choisir le moment idéal pour procéder à la récolte. Vous trouverez ci-dessous les résultats de notre outil.
Pour plus de renseignements concernant notre OAD, n’hésitez pas à échanger avec votre technicien.
Stade lentille vitreuse du maïs
Lorsque le maïs arrive à un taux de matière sèche de 25%, l’amidon commence à devenir vitreux. Pour les variétés dentées, une dépression se creuse. Pour les variétés cornées une lentille se forme au sommet du grain. Ces repères visuels apparaissent généralement 3 semaines après la floraison femelle du maïs. Il reste donc encore 7 points de matière sèche pour atteindre le stade 32% MS, il faut environ 22 à 26 degrés-jours base 6-30°C pour gagner 1% MS l’équivalent de 10 jours (journées à 15°C le matin et 27°C l’après-midi) à 16 jours (journées à 12°C le matin et 22°C l’après-midi).
Pour bien repérer la date du stade lentille vitreuse, il faut visiter les parcelles de maïs trois semaines après la floraison femelle. Cela permet de déclencher la récolte dans 10 à 20 jours selon les prévisions météo.
Ensilage : une coupe de taille moyenne, franche et des grains bien éclatés
La bonne valorisation du maïs fourrage par les animaux dépend de plusieurs critères : composition de la plante, stade de récolte, la longueur de coupe et l’éclatement des grains lors de l’ensilage, qualité du stockage et temps de fermentation. Idéalement, 68 jours de fermentation pour assurer une valorisation optimale.
Un excellent maïs sur pied peut perdre une grande partie de sa bonne valorisation par le rumen de la vache si l’ensilage n’est pas réalisé correctement.
Pour assurer une bonne valorisation du maïs fourrage, le chantier d’ensilage demande de la précision. Cette opération doit respecter certains critères bien spécifiques en lien avec le stade de récolte et le taux de matière sèche. Tout d’abord, il est important d’avoir pour objectif un taux de 32% de matière sèche. C’est le stade du grain où les trois amidons, vitreux, pâteux et laiteux, sont présents à parts égales. (Cette cible vous permettra de vous situer entre 30 et 35). Attention au maïs trop humide, le manque de maturité de la plante va entraîner un manque d’amidon et donc d’énergie. L’ingestion va s’en retrouver impactée et cela peut provoquer des pertes allant jusqu’à 2L/VL/J.
De même, le maïs trop sec entraîne également des pertes énergétiques. Après la sénescence de la plante, les pertes peuvent atteindre 0,04 UFL/kg MS, soit 1L/VL/J pour les rations moyennes (à 420€/1000L, cela représente 42cts/VL/J de manque à gagner).
La finesse de hachage ou longueur de coupe
La longueur de coupe aura une incidence sur le tassage du silo et sur l’ingestion par les animaux. L’objectif rendu auge est de 8 à 10 mm. Des éléments trop grossiers ne seront pas ingérés et provoqueront au silo des difficultés de tassage et de conservation. Des particules trop fines quant à elles réduiront la rumination et engendreront des problèmes digestifs. (Baisse du PH du rumen). Dans les deux cas, la valorisation du maïs sera pénalisée. Pour un maïs sec à 37 38% de MS, priorité à la conservation 10 à 12 mm de longueur de coupe maximum.
Il est important :
– de procéder à un tamisage au début du chantier pour confirmer une coupe franche ;
– mesurer la longueur moyenne des morceaux ;
– de s’assurer d’une faible proportion d’éléments grossiers.
Des grains bien éclatés
Le but étant de rendre l’amidon, principale source d’énergie de l’ensilage de maïs, plus facilement digestible. Pour assurer une bonne assimilation par l’animal, il ne suffit plus de dire que tous les grains doivent être touchés avec au moins les ¾ des grains éclatés en 4, il faut que le grain soit pulvérisé. Un point de vigilance, plus le stade du grain sera avancé avec une forte proportion amidon vitreux plus il devra être éclaté. Un bon réglage des rouleaux éclateurs est nécessaire. L’objectif étant qu’aucun morceau de grain ne puisse rester sur un tamis de 8mm. (L’idéal étant tamis de 4mm)
10% de grain non éclaté sur un maïs sortant à 35% d’amidon sur une analyse représente 0,5kg d’amidon pur manquant (ration moyenne à 14kgMS/VL/J ingéré) soit 0,8kg de maïs grain sec pour compenser la perte. Prenons 320€/T pour le maïs. Cela représente un surcoût de 26cts/VL/J pour seulement compenser le mauvais travail de récolte.
Afin de vérifier le bon réglage, il est possible de réaliser un test le jour de l’ensilage avec un seau. Mettre une poignée d’ensilage dans un seau et le remplir d’eau, la partie feuillage va flotter ce qui permettra de séparer les grains au fond du seau. Il sera plus facile de vérifier l’éclatement. Pour se faire, comptez le nombre de grains non éclatés. Il ne doit pas en rester. Si ce n’est pas le cas, demandez au conducteur de l’ensileuse de corriger les réglages de l’éclateur.
Implantation du colza : objectif colza robuste !
Un colza robuste est synonyme d’économie intrants, de couverture du sol plus rapide et de moins d’attaques de ravageurs…. Et pour le même investissement !
Afin de diversifier les assolements, le colza est une culture très intéressante. Les effets bénéfiques dans une rotation céréalière sont multiples : effet de coupure, apport au sol de matière organique. De plus la décomposition des résidus de la culture du colza produit des composés toxiques pour de nombreux pathogènes, dont des champignons conservés dans le sol. Un blé après colza produit environ 10 % de rendement en plus qu’un blé sur maïs.
Préparation du sol
La réussite de la culture passe par une bonne implantation, celle-ci sera la clé pour un colza robuste pouvant supporter les aléas climatiques et les attaques de ravageurs d’automnes.
Pour se faire, le sol doit être décompacté en profondeur pour limiter l’assèchement afin de favoriser un bon enracinement du pivot, d’améliorer l’assimilation en nutriments et par conséquent accroître la dynamique de croissance. En surface, une préparation de sol fine et rappuyer est nécessaire afin d’assurer le bon contact sol graine. Ce qui permettra également de conserver l’humidité résiduelle au sol.
Date et densités de semis
La date de semis est primordiale, semez tôt, les derniers jours d’août et avant le 5 septembre. L’objectif est d’atteindre le stade 4 feuilles avant le 20 septembre qui correspond au stade de fin de sensibilité du colza aux altises adultes. Si vous souhaitez semer un colza en association avec des plantes compagnes, anticipez cette même date de semis de 8 à 10 jours.
La profondeur optimale de semis est de 2 cm et maximum de 4 cm si le besoin est de trouver la fraîcheur.
Pour des écartements de 15-20 cm, on visera une densité de levée en sortie hiver de 20 à 30 plants/m². Pour des écartements larges, de l’ordre de 50 cm, favorables au binage, ne pas dépasser 15 plantes par mètre linéaire.
Fertilisation d’automne
Le colza valorise très bien les déjections animales à l’automne. Ne pas dépasser 65 kg /ha d’azote efficace, dose conseillée et dose plafond réglementairement.
Cet apport permettra de favoriser la vigueur de départ du colza. Sur fertiliser un colza à son implantation accentuera les risques d’élongation et de verse.
Risques ravageurs d’automne
La météo que nous avons connu ces dernières semaines accentue plus particulièrement le risque de limaces. Le type de sol, de nombreux débris végétaux, l’historique de la parcelle et l’environnement (cultures adjacentes…) seront à prendre en compte. Ce ravageur sera à surveiller attentivement du semis jusqu’à 4 feuilles du colza. Deux stratégies d’incorporation d’anti-limace sont possibles ; soit en association avec la semence ou passage en épandage à la surface du sol par la suite. Il est possible de conforter sa décision d’intervention en disposant des pièges à limaces : film plastique ou carton d’1 m² bien plaqué au sol sous lequel on retrouvera les limaces. Seuil d’intervention conseillé dès les premières captures de la levée à 3 feuilles, 10 limaces /m² vers 3-4 feuilles du colza.
Pour le risque d’altises d’automne, il faut surveiller de la levée au stade 3-4 feuilles. Le seuil d’intervention sur colza en bon état végétatif est de 8 pieds sur 10 avec morsures ou 25% de la surface foliaire consommée.
N’oubliez pas le piège à méligèthes. Anticiper la lutte contre les méligèthes dès le semis en incorporant un colza à floraison haute et précoce (ATRAKT). Cette variété sera plus attractive au printemps pour ces insectes et les éloignera des boutons floraux au stade de sensibilité.
Bientôt la récolte du sarrasin, une culture avec de nouvelles opportunités
Le sarrasin, culture emblématique de notre région, retrouve de l’intérêt avec les différentes crises qui ont montré notre dépendance à son importation depuis la Chine, la Russie ou encore l’Ukraine. Remarquons aussi que réintroduire du sarrasin dans les parcelles a également l’avantage de diversifier l’assolement, avec tous les avantages agronomiques qui l’accompagnent ainsi que les opportunités au niveau de la réglementation PAC.
Bien que ce soit une culture traditionnelle et qui demande très peu d’intrants, la technique évolue autour de cette culture.
Nouvelle technique de récolte
Le battage du sarrasin est l’étape la plus délicate de la culture. Elle se déroule entre mi-septembre et fin octobre, période pendant laquelle les créneaux de beau temps peuvent être courts selon les années. Déterminer une date de récolte est toujours un compromis, puisque les floraisons sont continues, il y a toujours des grains immatures au moment de la récolte. On vise généralement 80% de grains matures. À ce stade les tiges sont complètement rougies et les feuilles sont partiellement tombées. Le fauchage est une pratique qui se développe fortement pour faciliter les chantiers et précocifier la récolte d’une dizaine de jours. Il faut compter au moins trois jours de beau temps entre l’andainage et la récolte.
Variétés plus précoces
À côté de la variété traditionnelle bretonne (la Harpe), il existe des variétés dites à grosses graines telles que Zita qui produisent des rendements similaires dans un cycle plus court avec un comportement un peu plus déterminé.
On y trouve plusieurs intérêts :
- Pouvoir faire une récolte tôt, donc dans les meilleures conditions ;
- Se proposer en solution de rattrapage de culture de printemps ;
- Tenter la double culture, derrière un colza ou une orge sortis tôt. Bien que plus risqué qu’un semis en mai, un semis de fin juin avec une variété très précoce a des chances d’aboutir.